f ISSN 0753-4973
K Oil
AILNTES
Septembre 1984 Volume 3, fascicule 3
Source : MNHN, Paris
SOCIETE BATRACHOLOGIQUE DE FRANCE
(Société pour l'Etude et la Protection des Amphibiens)
Siège social: Laboratoire des Reptiles et Amphibiens,
Muséum national d'Histoire naturelle,
25 rue Cuvier, 75005 Paris, France.
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Source : MNHN, Paris
AILVTES
Bulletin trimestriel Volume 3
Septembre 1984 Fascicule 3
Alytes, 1984, 3 (3): 97-101. 97
LA PHYLOGENESE DES RANOIDEA ET LE CLADISME
Raymond F. LAURENT
Fundacién Miguel Lillo, Miguel Lillo 205,
4000 Tucumén, Argentine
ABSTRACT. - The author cniticizes R. C. DREUES (1984] for what he
considers as his faithfullness to the Letter rather than to the ménd of c£a-
dism. He c£aims that &f synapomorphies are admittedly the best cêues to the
monophyly 0$ a group, recent symplesiomonphies cannot be nejected as 0$4-
handedty as old ones. In the case än point, DREWES exc£uded the Astyloster-
ninae from the family Hyperoliidae, because they have on£y symplesiomonphies
än common, only to put them back into the Ranidae, in spite of their having
Ati Less symplesiomonphies and synapomorphies either. The closest nelati-
ves of Hyperoliinae ane the Astylosterninae negardless of the primétiveness
on advancedness of their shared features. The Astylosterninae are obvious£y
paraphyletic and hence, any family into which it wou£d be deemed conventent
to put them. But paraphyly £s not completely avoidable and has to be accep-
tèd somewhere. Therefone LAURENT'4 1980 c£assigication is maintained as the
most compatible with the phylogeny of nanoids in the present state 0$ our
knowledge.
Bibliothèque Centrale Huséum
0 RUN
00110029 5
Source : MNHN, Paris
98
L'auteur de ces lignes s'était naïvement imaginé recevoir au moins
l'approbation des cladistes quand il a maintenu (LAURENT, 1980) la position
qu'il avait défendue déjà en 1951 (LAURENT, 1951) et qui était alors nou-
velle, à savoir qu'il y a dans les Ranoïdea deux lignées importantes sépa-
rées depuis longtemps, depuis le Crétacé, semblerait-il d'après SALTHE & KA-
PLAN (1966): les Hyperoliidae (Astylosterninae, Arthroleptinae, Hyperoli-
inae) et les Ranidae (Raninae, Phrynobatrachinae, Mantellinae, Rhacophori-
nae). En effet, il lui était apparu que l'esprit du cladisme devait essen-
tiellement consister en un souci de reconnaître les clades plutôt que les
grades, ce qui pourrait difficilement passer pour déraisonnable. Aussi n'a-
t-il pas suivi ceux qui entendaïent insister sur la distinction qu'on pou-
vait faire dans chaque lignée entre les raïinettes plus évoluées et les non-
rainettes, moins évoluées (LIEM, 1970; DUBOIS, 1981).
Cependant, les ambitions du cladisme se sont rapidement avérées
dépasser ces objectifs relativement modestes. La passion, qui n'avait que
faire en cette galère, s'en est mêlée, suscitant des polémiques passablement
risibles. Certains disciples de HENNIG, perdant de vue l'esprit du cladisme
pour s'attacher aveuglément à certaines règles, autrement dit à la lettre du
cladisme, se sont mis à traquer fanatiquement tout vestige de symplésiomor-
phie et de paraphylie, donnant ainsi, de manière bien inattendue, une illus-
tration systématique au mythe de Sisyphe.
Cette excroissance de la systématique phylogénétique a inspiré de
nombreux travaux dont beaucoup sont d'ailleurs excellents, ce qui ne les em-
pêche pas de verser souvent par quelques détails dans un formalisme vétil-
leux.
R. C. DREWES (1984) vient de nous en donner un exemple intéressant
par son analyse phylogénétique des Hyperoliidae, travail exemplaire à tous
égards, sauf deux. On ne cite ici qu'en passant l'une de ces erreurs, car
elle n'a pas trait au sujet de ces commentaires. Le squelette d'Afrixalus
est à tel point semblable à celui de Kassina et des genres voisins qu'il
doit faire partie du même groupe ou en constituer à lui seul le groupe
frère, mais ne saurait en aucun cas passer pour un proche parent de Hypero-
Lius ou Heterixalus, leurs ressemblances étant dues pour la plupart à la pé-
dogenèse et donc à la convergence.
L'autre erreur est le rejet de toute parenté entre Hyperoliinae et
Astylosterninae sous prétexte que leurs caractères communs (métasternum sans
Source : MNHN, Paris
99
style osseux; 3° carpien en principe non soudé aux 2° central, 4° et 5° car-
piens; 2° tarsien distal libre; appareil hyoïdien à thyrohyaux en général
très écartés; pupille en principe verticale; tubercule métatarsien externe
absent ou peu développé) sont des symplésiomorphies. Tout d'abord, ce n'est
pas entièrement exact: l'écartement des thyrohyaux, ce qu'on pourrait peut-
être plus adéquatement décrire en disant que la base des thyrohyaux est car-
tilagineuse (encore que parfois très réduite) est une synapomorphie qui les
rapproche et sans doute peut-on en dire autant des métatarsiens non séparés
par la palmure. Maïs la question n'est pas là. 11 est simpliste d'opposer
l'apomorphie à la plésiomorphie sans plus, car il y à toute une gradation
dans la plésiomorphie depuis l'origine de la vie jusqu'à l'avant-dernière
innovation, la dernière méritant seule vraiment le titre d'apomorphie. Bien
évidemment, l'écart entre les apomorphies d'aujourd'hui et celles d'hier est
presque négligeable, si on le compare à celui qui existe entre une apomor-
phie récente et une plésiomorphie datant du Cambrien ou même du Trias. En
l'occurrence, les synapomorphies qui garantissent la monophylie (au sens
classique ou au sens cladiste) des Hyperoliidae ou Hyperoliinae ont été pré-
cédées dans le temps par des synapomorphies qui attestent la monophylie des
Ranoïdea et non pas, on en convient volontiers, ‘des Hyperoliidae au sens
large. D'autre part, personne n'a mis en doute la monophylie des Ranidae au
sens large, même pas DREWES qui l'admet aussi au sens restreint, puisqu'il
reconnaît une famille des Rhacophoridae, ce qui rend ses Ranidae paraphylé-
tiques. 11 suffit en effet d'ôter aux Rhacophoridae leurs synapomorphies
(cartilages intercalaires et disques adhésifs digitaux développés, complète-
ment entourés d'un sillon profond; phalanges terminales en forme de T) pour
en faire des Ranidae. Notons qu'en cladiste convaincu DREMES n'aurait pas dû
admettre ce groupe paraphylétique, mais on ne lui cherchera pas querelle à
ce propos tant on est persuadé que la paraphylie est inévitable et qu'il n'y
a pas lieu d'en faire un drame. On ne l'élimine d'ailleurs pas en faisant
des Raninae et Rhacophorinae des sous-familles, on déplace tout simplement
le problème à ce niveau, si problème il y a.
De même, il suffit d'ôter aux Hyperoliinae et aussi aux Raninae
leurs synapomorphies (cartilages intercalaires et disques adhésifs, ceinture
scapulaire laxizone, écologie arboricole pour les Hyperoliinae; métasternum
avec style osseux, 3° carpien soudé au 2° central et aux 4° et 5° carpiens,
2° tarsien soudé aux 3° et 4°, pupille généralement horizontale, tubercule
métatarsien externe bien développé pour les Raninae) pour en faire des Asty-
Source : MNHN, Paris
100
losterninae. Ceux-ci sont donc plus paraphylétiques encore que les Raninæe,
qu'on en fasse une famille ou une sous-famille, mais les objections que
DREWES a opposées à leur inclusion dans la famille des Hyperoliidae s'appli-
quent avec bien plus de force à leur incorporation à celle des Ranidae puis-
que les synapomorphies qui l'appuient valent aussi pour les Hyperoliinaæe,
les Rhacophorinae et les Arthroleptinae et justifient donc seulement la su-
perfamille des Ranoïdea. Malgré cela, DREWES en fait des Ranidae, cessant
donc arbitrairement d'appliquer les critères qui l'ont mené à rejeter leur
appartenance à la famille des Hyperoliidae. Son schéma phylogénétique est
d'ailleurs également en contradiction avec sa classification car sa "tétra-
chotomie" non résolue implique l'élévation au rang de famille des Astylo-
sterninae et des Arthroleptinae, ce qu'il n'a nullement proposé et paraîtra
sûrement superflu à maints batrachologues. Sa phylogenèse implique aussi que
les Hyperoliinae ont un ancêtre commun avec les Astylosterninae (et aussi
les Arthroleptinae et les Raninae) mais qui serait plus primitif que ces
derniers. Or, rien ne justifie pareille hypothèse: les Astylosterninae ne
paraissent pas avoir de synapomorphies qui leur soient propres. Selon toute
apparence, l'ancêtre des Hyperoliinae, celui des Arthroleptinae et celui des
Raninae seraient tous trois considérés comme des Astylosterninae si on les
connaissait.
L'idée que les groupes frères diffèrent tous de leur ancêtre com-
mun de manière tranchée est évidemment une illusion qu'il vaudrait mieux
abandonner sous peine de construire des classifications arbitraires.
Dans le cas qui nous occupe, les Hyperoliinae sont les Ranoïdea
qui se sont le moins écartés des Astylosterninae, à part leurs adaptations
arboricoles. Il n'y a donc aucune raison de les en séparer sous le falla-
cieux prétexte d'une symplésiomorphie bien trop récente pour être aussi 1é-
gèrement disqualifiée. Quant aux Arthroleptinae, ils sont clairement issus
eux aussi des Astylosterninae et quoique très apomorphes à bien des égards,
ils en ont conservé plusieurs traits primitifs (absence de phalanges inter-
calaires et de disques adhésifs digitaux; 3° carpien non soudé aux 2° cen-
tral, 4° et 5° carpiens; métasternum sans style osseux; peut-être omosternum
fourchu)!, dont certains ont disparu chez les Hyperoliinae (absence de pha-
1. La tendance à la bifurcation des coracoïdes et les os sésamoïdes sous les
articulations des phalanges seraient plutôt des synapomorphies qui pour-
raient justifier d'un point de vue cladistique la classification de DUBOIS
(1981).
Source : MNHN, Paris
101
langes intercalaires et de disques adhésifs digitaux), mais bien davantage
chez les Raninae (3° carpien non soudé aux 2° central, 4° et 5° carpiens;
métasternum sans style osseux; peut-être omosternum fourchu; 2° tarsien li-
bre; phalanges terminales crochues; pupille verticale; absence ou faible dé-
veloppement du tubercule métatarsien externe). I1 s'ensuit que les Arthro-
leptinae, sans être les plus proches parents des Hyperoliinae (comme cer-
tains me l'ont erronément fait dire), particularité qui n'appartient qu'aux
Astylosterninae, en sont quand même plus voisins qu'ils ne le sont des Rani-
nae et des Phrynobatrachinae.
En conclusion, on croit pouvoir maintenir la classification des
Ranoïdea en trois familles (Ranidae, Hyperoliidae, Hemisidae) (LAURENT,
1980). Dans ce système, les Hyperoliidae sont évidemment paraphylétiques
mais puisque les Astylosterninae le sont, la famille qui les contient l'est
nécessairement aussi et c'est 1à le minimum irréductible qui nuit à l'idéale
pureté cladistique d'une classification des Ranoïdea.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
DREWES, R. C., 1984. - A phylogenetic analysis of the Hyperoliidae (Anura):
treefrogs of Africa, Madagascar and the Seychelles Islands. Occ. Pap.
Calif. Acad. Sci., 139: i-x + 1-70.
DUBOIS, A., 1981. - Liste des genres et sous-genres nominaux de Ranoidea
(Amphibiens Anoures) du monde, avec identification de leurs espèces-
types: conséquences nomenclaturales. Monit. zool. ital., (n. s.), 15,
suppl.: 225-284.
LAURENT, R. F., 1951. - Sur la nécessité de supprimer la famille des Rhaco-
phoridae mais de créer celle des Hyperoliidae. Rev. Zool. Bot. afr.,
45: 116-122.
= 1980. - Esquisse d'une phylogenèse des Anoures. Bull. Soc. zool. Fr.,
1979, 104: 397-422,
LIEM, S. S., 1970. - The morphology, systematics and evolution of the Old
World treefrogs (Rhacophoridae and Hyperoliidae). Fieldiana: Zool., 57:
i-vii + 1-145.
SALTHE, S. N. & KAPLAN, N. O., 1966. - Immunology and rates of enzyme evolu-
tion in the Amphibia in relation to the origins of certain taxa. Evolu-
tion, 20: 603-616.
Source : MNHN, Paris
Alytes, 1984, 3 (3): 102.
A New Reprint
HERPETOLOGY OF ARABIA
by John Anderson
with an extensive introduction by Alan E. Leviton and Michele L. Adrich
including a new checklist of Arabian amphibians and reptiles
In 1896 John Anderson published the book À Contribution to the
Herpetology of Arabia, with a Preliminary List of the Reptiles and
Batrachians of Egypt, a pioneering effort to summarize the herpetology of
those regions and, to this day, the only herpetology of the Arabian
Peninsula. The original book is exceedingly rare, probably published in an
edition of no more than 100 copies, and is much less known than
Anderson's major work on amphibians and reptiles in the Zoology of Egypt
series. The Arabian book includes a description of the physical features, a
review of the amphibians and reptiles of the Arabian Peninsula including
Yemen, an exhaustive bibliography of the herpetology of Arabia, and a
checklist of species both of Arabia and of Egypt including the Sinai. This
reprint includes a new introduction with a biography and portrait of
Anderson, a list of his publications and an up-to-date checklist of the
herpetofauna of Arabia, with map. The book is 160 pages, 6 x 9 inches (15.5
x 23 cm), and bound in buckram; there is one plate in full color.
TO ORDER
SSAR members, if ordered before 30 November 1984 US $18
Institutions; Non-members; All orders after 30 November . US $24
SSAR members must place their orders now to take advantage of the
special pre-publication price. The book will be published in December 1984.
Send orders to Dr. Douglas H. Taylor, Department of Zoology, Miami
University, Oxford, Ohio 45056, USA. Please make checks payable to
“SSAR”. AIl USA orders are postpaid; shipments outside the USA will be
charged only the additional shipping costs in excess of domestic rates.
Overseas customers must pay in USA funds or by International Money
Order, or may charge to MasterCard or VISA (give account number and
expiration date). À complete list of Society publications and membership
information can be obtained from Dr. Taylor. The Society publishes Journal
of Herpetology, Facsimile Reprints in Herpetology, Herpetological Review,
Herpetological Circulars, Catalogue of American Amphibians and Reptiles,
Contributions to Herpetology, and Recent Herpetological Literature.
SOCIETY FOR THE STUDY OF AMPHIBIANS AND REPTILES
Source : MNHN, Paris
Alytes, 1984, 3 (3): 103-110. 103
MISCELLANEA NOMENCLATORICA BATRACHOLOGICA (IV)
Alain DUBOIS
Laboratoire des Reptiles et Amphibiens, Muséum national
d'Histoire naturelle, 25 rue Cuvier, 75005 Paris, France
ABSTRACT. - The generic name Hydromantes Gistel, 1848 &s shoun to
be a substitute name $or Geotriton Bonaparte, 1832. The type-species, by mo-
notypy, 0$ this genus, &s Salamandra exigua Laurenti, 1768, a synonym of La-
certa vulgaris Lénné, 1758, now a member of the genus Triturus Raginesque,
1815. The consequences of this fact ane discussed, in particular in the
Light 0$ the recent creation 04 the generic name Hydromantoides Lanza &
Vanni, 1981. It &s suggested to netain this Latter name for both the Ameri-
can and European species 0f this group, and 40 necognize Æno subgenera wi-
thin this genus. À new name £s proposed fon the European subgenus.
Le nom générique Hydromantes Gistel, 1848 est actuellement consi-
déré par tous les auteurs comme le nom valide d'un genre d'Urodèles de la
famille des Pléthodontidés. On considère généralement (par exemple: MERTENS
& WERMUTH, 1960: 34) que l'espèce-type de ce genre est Safamandra genei Tem-
minck & Schlegel, 1838.
En réalité, GISTEL (1848: xi) ne proposa pas Hydromantes comme le
nom d'un nouveau genre, mais comme un nom de remplacement pour le nom géné-
rique déjà existant Geotniton Bonaparte, 1832. Après être resté longtemps
dans l'oubli, le nom Hydromantes Gistel, 1848 fut ressuscité par DUNN (1923)
qui estima que ce nom était un nom de remplacement pour le nom "Geotriton
Tschudi, 1838". Selon DUNN (1923), il existerait trois genres nominaux dis-
tincts portant le nom de Geotriton, et possédant chacun une espèce-type dif-
férente:
- Geotniton Bonaparte, 1832 (espèce-type: Salamandra exigua Lau-
Source : MNHN, Paris
104
renti, 1768);
- "Geotriton Bonaparte, 1837" (espèce-type: "Geotriton fuscus Bo-
naparte, 1837");
- "Geotriton Tschudi, 1838" (espèce-type: Salamandrua genei Tem-
minck & Schlegel, 1838).
GISTEL (1848: xi) ne précisant pas l'auteur du nom Geotréton qu'il
propose de remplacer par le nouveau nom Hydromantes, l'opinion de DUNN
(1923: 40) selon lequel il s'agirait de "Geotruéton Tschudi, 1838" est sujet-
te à caution. De toute manière, l'examen des textes originaux montre qu'il
n'est pas justifié de reconnaître l'existence des trois genres nominaux men-
tionnés ci-dessus, et qu'il n'existe, d'un point de vue nomenclatural, qu'un
seul genre nominal, Geotrcton Bonaparte, 1832.
Le nom Geotriton fut publié pour la première fois par BONAPARTE
(1831) sans aucune diagnose ni citation de noms d'espèces incluses: il s'a-
gissait alors d'un nomen nudum, dépourvu de statut en nomenclature.
Peu après, BONAPARTE (1832) mentionnait de nouveau le nom Geotri-
on, comme nom de sous-genre (au sein du genre Tnüton Laurenti, 1768), ac-
compagné cette fois d'une diagnose, qui rend le nom disponible, et associé
au nom d'une seule espèce nominale incluse, Salamandra exigua Laurenti,
1768, qui est donc l'espèce-type par monotypie du nouveau genre, comme l'a-
vait du reste noté DUNN (1923).
MICHAHELLES (1833), rendant compte du travail de BONAPARTE (1832),
discutait longuement le statut du nom Geotriton, et proposait une synonymie
détaillée pour l'espèce-type de ce genre, Sa£amandra exigua Laurenti, 1768.
Quelques années plus tard, BONAPARTE (1837) revenait sur son in-
terprétation initiale. I1 estimait que le nom Salamandra exigua Laurenti,
1768 était un synonyme de Sa£amandra punctata Latreille, 1800. Par ailleurs,
il conservait le nom générique Geotriton, mais cette fois pour l'appliquer à
l'espèce Salamandra fusca Laurenti, 1768. Il donnait une bonne figure de
l'espèce à laquelle il appliquait le nom de Geotriton fuscus (BONAPARTE,
1837: pl. 84, fig. 4). À la lumière de cette figure, il est clair que l'es-
pèce visée par BONAPARTE (1837) dans sa description de Geotriton fuscus é-
tait différente de celle décrite par LAURENTI (1768) sous le nom de Sa£aman-
dra fusca, et qui est actuellement considérée comme un synonyme de Sa£aman-
dra atra Laurenti, 1768 (voir par exemple MERTENS & MERMUTH, 1960: 19). Tou-
Source : MNHN, Paris
105
tefois, cette erreur d'identification de la part de BONAPARTE (1837) n'en-
traîne pas qu'il soit, comme le prétend DUNN (1923), l'auteur d'une espèce
nominale nouvelle "Geotritcn £uscus Bonaparte, 1837": l'application erronée
d'un nom scientifique déjà existant à une espèce différente de celle visée
par le créateur de ce nom n'implique pas, par chance, à chaque fois la créa-
tion d'un nouveau nom ayant un statut en nomenclature, car sinon la littéra-
ture scientifique serait extraordinairement encombrée! (A cet égard, on con-
sultera avec profit le travail de SMITH & SMITH (1972), où est proposée la
distinction, fort utile à notre avis, entre chrésonyme, dépourvu de statut
en nomenclature, et synonyme.)
DUNN (1923: 40) proposa le nouveau nom Hydromantes italicus comme
“nom. nov." pour "Geotriton fuscus Bonaparte, 1837". Ce dernier nom n'ayant,
comme nous l'avons vu, pas de statut en nomenclature, on pourrait, de maniè-
re très rigide, considérer que le nom H. £talicus est en fait un nom de rem-
placement pour Sa£amandra fusca Laurenti, 1768, et donc à son tour un syno-
nyme de Salamandra atra Laurenti, 1768. Toutefois, comme DUNN (1923: 40)
précisait expressément que ce nouveau nom était proposé pour l'espèce décri-
te et figurée par BONAPARTE (1837) et en raison précisément du fait que cet-
te espèce était distincte de celle nommée Sa£amandra fusca par LAURENTI
(1768), il semble judicieux d'admettre la validité du nom H. italicus - mais
alors non pas comme nom de remplacement ("nom. nov.") pour un nom qui,
n'ayant pas de statut en nomenclature, ne saurait être remplacé, mais bien
comme nom d'une espèce nominale nouvelle (qui aurait alors dû porter en fait
la mention "sp. nov."). Le fait que le nouveau nom H. éta£icus soit suivi
d'une référence précise à la description de Geotriton fuscus dans le fasc.
XIX de la Fauna étabica de BONAPARTE peut alors être tenu pour une "indica-
tion", au sens de.l'Art. 16 du Code (ANONYME, 1964), qui rend ce nouveau nom
disponible.
A l'examen des deux textes incriminés de BONAPARTE (1832, 1837),
il est de même clair que cet auteur appliquait le nom Geotriton dans Îles
deux cas à la même espèce biologique, qui n'avait pas encore été nommée à
l'époque et qui devait être nommée, bien plus tard, Hydromantes italicus par
DUNN (1923). BONAPARTE pensa tout d'abord (1832) que c'était cette espèce
qui avait été nommée Sa£amandna exigua par LAURENTI (1768), puis, ultérieu-
rement (1837), que c'était celle qui avait reçu du même LAURENTI (1768) le
nom de Sa£amandra fusca. Ce faisant, toutefois, il ne fit que multiplier les
erreurs d'identification, mais dans toute cette affaire il ne créa qu'un nom
Source : MNHN, Paris
106
scientifique nouveau, Geotriton Bonaparte, 1832, qu'il appliqua successive-
ment à deux espèces nominales distinctes: pas plus que, comme nous l'avons
vu ci-dessus, BONAPARTE n'est l'auteur d'un nouveau nom spécifique "Geotrt-
ton fuscus Bonaparte, 1837", il n'est l'auteur d'un nouveau nom spécifique
“Geotriton exiguus Bonaparte, 1832", ni d'un nouveau nom générique "Gectui-
4on Bonaparte, 1837". Le nom générique Geotriton qui apparaît dans la combi-
naison Geotriton fuscus dans le travail de BONAPARTE (1837) n'est autre que
Geotriton Bonaparte, 1832.
I1 en va exactement de même pour le nom Geotriton qui apparaît
dans les travaux de TEMMINCK & SCHLEGEL (1838) et de TSCHUDI (1838), et qui
est du reste explicitement attribué par ces auteurs à BONAPARTE. Toutefois
TEMMINCK & SCHLEGEL (1838) proposèrent un nouveau nom spécifique (Sa£amandra
genei) pour des animaux provenant de Sardaigne, et mentionnèrent également,
comme synonyme de ce binomen, la combinaison Geotriton genei. Celle-ci fut
reprise par TSCHUDI (1838) qui, contrairement à TEMMINCK & SCHLEGEL (1838),
considérait le genre Geotriton comme valable: ce faisant, pas plus que BONA-
PARTE (1837), il ne créa un nouveau genre nominal "Geotriton Tschudi, 1838".
I1 résulte de la discussion qui précède qu'il existe un seul genre
nominal d'Urodèles portant le nom de Geotriton, à savoir Geotriton Bonapar-
te, 1832. Comme nous l'avons vu, l'espèce-type de ce genre est Salamandra
exigua Laurenti, 1768, par monotypie. Cette espèce nominale est actuellement
considérée (voir par exemple MERTENS & WERMUTH, 1960: 31) comme un synonyme
de l'espèce nominale Lacerta vulgaris Linné, 1758. Dans ces conditions, le
nom Geotriton Bonaparte, 1832, ainsi que son nomen substitutum Hydromantes
Gistel, 1848, doivent être transférés dans la synonymie du nom Tacturus Ra-
finesque, 1815, et le nom Hydromantes ne peut être conservé pour le genre
comportant les espèces genei et italicus.
La question qui peut alors se poser est de savoir si l'on ne pour-
rait pas se référer, dans ce cas, à l'Art. 70 du Code (ANONYME, 1964), qui
précise que lorsqu'un zoologiste estime que l'espèce-type d'un genre a été
mal identifiée lors de la.création de ce genre, il doit faire appel à la
Commission internationale de Nomenclature zoologique pour lui demander de
faire usage de ses pleins pouvoirs pour désigner une espèce-type pour ce
genre. Dans le cas présent, on pourrait envisager de demander à la Commis-
sion d'invalider la désignation de Sa£amandra exigua Laurenti, 1768 comme
espèce-type, par monotypie, de Geotriton Bonaparte, 1832, et de désigner une
Source : MNHN, Paris
107
autre espèce nominale (par exemple Sa£amandra genei Temminck & Schlegel,
1838, ou Hydromantes £talicus Dunn, 1923) comme espèce-type de ce genre.
Mais alors, un nouveau problème apparaît: le nom Hydromantes Gistel, 1848
étant un strict nom de remplacement pour Geotriton Bonaparte, 1832, ce der-
nier nom à en réalité la priorité, et devrait alors le remplacer comme nom
valide du genre. Pour conserver le nom Hydromantes, il faudrait donc deman-
der de plus à la Commission de faire usage de ses pleins pouvoirs pour inva-
lider le nom Geotriton et valider à sa place le nom Hydromantes.
En réalité, nous estimons que dans le cas présent le recours à une
procédure aussi lourde n'est pas justifié, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, le nom Hydromantes Gistel, 1848 est resté longtemps
dans l'oubli, et n'a été ressuscité qu'assez récemment (1923). De plus, en
Europe les espèces rapportées à ce genre sont peu nombreuses et fort mal
connues, et n'ont pas fait l'objet d'un nombre très élevé de publications
depuis 1923.
Enfin et surtout, il existe depuis peu un nouveau nom générique,
qui de surcroît a l'avantage de ressembler beaucoup au nom Hydromantes, pour
désigner ce genre.
Récemment en effet, LANZA & VANNI (1981), s'appuyant sur les ré-
sultats d'un travail de WAKE, MAXSON & WURST (1978) où les espèces américai-
nes et européennes de ce genre étaient comparées par des méthodes électro-
phorétiques et immunologiques, ont créé un genre Hydromantoides pour les es-
pèces américaines de ce groupe, malgré l'absence de différenciation morpho-
logique sensible entre les deux lignées. LANZA & VANNI (1981) estiment que
le groupe en question pourrait être polyphylétique et que la ressemblance
morphologique entre les espèces américaines et européennes pourrait être due
à un phénomène de convergence. Pour l'instant toutefois, en l'absence de
tout argument concret, ce polyphylétisme n'est nullement démontré, et il
faut reconnaître que les éléments de diagnose avancés par LANZA & VANNI
(1981: 119-120) pour distinguer Hydiomantes et Hydiomantoides sont légers,
et nullement suffisants à notre avis pour étayer la conception selon laquel-
le ces deux groupes constituent des genres différents (sur la notion de gen-
re en zoologie, voir DUBOIS, 1981 a-b, 1982, 1983). Nous proposons donc, du
moins en l'attente d'arguments supplémentaires en faveur de la séparation
des deux groupes au niveau générique, de réunir à nouveau ceux-ci au sein
d'un même genre. Le nom Hydromantoides Lanza & Vanni, 1981 est disponible
Source : MNHN, Paris
108
pour ce genre, et permet de conserver pour celui-ci .un nom fort peu diffé-
rent de celui qu'il portait depuis 1923, sans avoir à faire appel à la Com-
mission internationale de Nomenclature zoologique. Par ailleurs, les noms
Geotriton Bonaparte, 1832 et Hydromantes Gistel, 1848 doivent être transfé-
rés dans la synonymie du nom Taituwwus Rafinesque, 1815.
En l'absence d'une divergence morphologique sensible entre Îles
deux lignées américaine et européenne de ce groupe, la divergence génétique
importante entre celles-ci, mise en évidence par WAKE, MAXSON & WURST
(1978), pose un problème intéressant aux chercheurs s'intéressant aux moda-
Tités de l'évolution. Dans un tel cas, l'usage de la catégorie du sous-genre
est indiqué (voir à ce sujet DUBOIS, 1982). Le sous-genre américain conserve
le nom d'Hydromantoides Lanza & Vanni, 1981, tandis qu'il est nécessaire de
créer un nom pour le sous-genre européen (l'introduction d'un nouveau nom au
niveau subgénérique pose bien moins de problèmes qu'au niveau générique).
WAKE, MAXSON & HURST (1978) ont montré que la divergence génétique est bien
plus importante entre H. £talicus et les espèces américaines qu'entre ces
dernières et H. genei. Pour cette raison nous choisissons H. £talicus comme
espèce-type du nouveau sous-genre.
Le genre Hydromantoides et ses deux sous-genres sont brièvement
définis ci-dessous.
Genre Hydromantoides Lanza & Vanni, 1981
Sous-genre Hydromantoides Lanza & Vanni, 1981
Hydromantoides Lanza & Vanni, 1981: 119. - Espèce-type par désignation ori-
ginale: Spelerpes platycephalus Camp, 1916.
Diagnose. - Voir LANZA & VANNI (1981: 119-120), et aussi WAKE, MAXSON &
MURST (1978).
Espèces incluses. - Hydromantoides ([Hydromantoides| brunus (Gorman, 1954);
Hydromantoides (Hydromantoides] platycephalus (Camp, 1916); Hydroman-
toides (Hydromantoides| shastae (Gorman & Camp, 1953).
Répartition. - Californie.
Sous-genre Speleomantes sbgn. nov.
Espèce-type. - Hydromantes italicus Dunn, 1923.
Source : MNHN, Paris
109
Diagnose. - Voir la diagnose de Hydromantes dans LANZA & VANNI (1981: 119-
120), et voir aussi WAKE, MAXSON & WURST (1978).
Espèces incluses (fide LANZA & VANNI, 1981 et LANZA, NASCETTI & BULLINI,
1982). - Hydromantoides (Speleomantes) ambnosii (Lanza, 1954); Hydro-
mantoides (Speleomantes] £lavus (Stefani, 1969); Hydromantoides (Spe-
Leomantes) genei (Temminck & Schlegel, 1838); Hydromantoides (Speteo-
mantes) imperialis (Stefani, 1969); Hydromantoides ([Speleomantes) ita-
Licus (Dunn, 1923).
Répartition. - Sud-est de la France, nord et centre de l'Italie, Sardaigne.
Etymologie. - Ce nom, de genre masculin, dérive des noms grecs 4pelaion, ca-
verne (par allusion aux moeurs des espèces de ce groupe) et mantis,
devin (désinence du nom Hydromantes).
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Source : MNHN, Paris
Alytes, 1984, 3 (3): 111-116. 111
MISCELLANEA NOMENCLATORICA BATRACHOLOGICA (V)
Alain DUBOIS
Laboratoire des Reptiles et Amphibiens, Muséum national
d'Histoire naturelle, 25 rue Cuvier, 75005 Paris, France
ABSTRACT. - Thés paper draws the attention to some necessary chan-
ges inthe suprageneric nomenc£ature of the Amphibia Gymnophiona and Unrodeka.
The name of the ondex Gymnophiona must be cnedited to RAFINESQUE-SCHMALTZ
(1814) änstead of MULLER (1831). New spellings ane suggested for the names
o$ the subonders of the Unodela. À £ew family-group names currently conside-
ned valid must be replaced by older names; for some other names, the dates
and/or authors traditionally given to them must be changed.
A l'occasion de la rédaction du chapitre du Traité de Zoologie de
GRASSE consacré à la systématique et à la répartition géographique des Am-
phibiens, LAURENT (1984 c) a proposé une classification détaillée de la to-
talité des formes actuelles de cette classe, en partie originale, et s'ap-
puyant sur les travaux récents. Ce travail est encore inédit sous sa forme
complète, mais les grandes lignes, ou les nouveautés principales, en ont
maintenant été publiées, par LAURENT lui-même pour les Anoures (LAURENT,
1980) et les Gymophiones (LAURENT, 1984 a), et par RAFFAELLI (1983) pour
les Urodèles. Cette classification, même si elle n'est pas acceptée dans sa
totalité par tous les auteurs, servira certainement de référence pour de
nombreux travaux et pendant longtemps. I] nous a donc paru utile de complé-
ter cet important travail par une étude des aspects nomenclaturaux du pro-
blème: en effet la nomenclature supragénérique des Amphibiens a fait l'objet
jusqu'à présent de bien moins d'attention que leurs nomenclatures générique
et spécifique. Après avoir consacré plusieurs travaux à la nomenclature su-
pragénérique des Anoures (DUBOIS, 1981, 1983, 1984 a), nous présentons ici
de manière préliminaire quelques premières données nouvelles sur la nomen-
Source : MNHN, Paris
112
clature suprégénérique des Gymnophiones et des Urodèles, en attendant la pu-
blication d'une liste des taxons supérieurs de ces deux ordres (DUBOIS,
1984 c).
Pour commencer, notons que c'est par erreur que le nom d'ordre
Apoda est traditionnellement (voir par exemple KUHN, 1967) attribué à OPPEL
(1811 c). Soulignons tout d'abord que le travail d'OPPEL sur la classifica-
tion des Reptiles, qui avait été effectué à Paris, fut d'abord publié en
français, dans les Annales du Muséum d'Histoire naturelle, en trois parties
successives (OPPEL, 1810 a-b-c), qui furent ensuite réimprimées telles quel-
les sous forme d'une brochure unique (OPPEL, 1811 a); Île contenu de ce tra-
vail fut également présenté de manière plus brève dans le Nouveau Bulletin
des Sciences, par La Société philomatique (OPPEL, 1811 b), et, enfin, publié
en allemand à Munich (OPPEL, 1811 c). Contrairement à l'habitude, les noms
dus à OPPEL (dont notamment le nom d'ordre de Reptiles Squamata) doivent
donc être datés de 1810 et non de 1811.
En ce qui concerne le nom Apoda, il est clairement présenté par
OPPEL (1810 c: 409) comme un nom de famille, et n'est donc pas disponible
pour un ordre, en vertu des règles que nous avons proposées ailleurs (DU-
BOIS, 1984 a). Le premier auteur à avoir attribué le nom Apoda à un ordre
est MERREM (1820: 163), qui en est donc l'auteur, au sens nomenclatural du
terme. Le genre-type de l'ordre des Apoda Merrem, 1820 est Caecilia Linné,
1758, par monotypie. Ce nom ne peut toutefois être conservé pour cet ordre
d'Amphibiens, étant préoccupé par le nom Apodes, proposé par LATREILLE
(1804: 73, 75, 103) pour trois ordres distincts de sa classe des Pisces.
Pour cette raison, KUHN (1965, 1967) et d'autres préconisent l'emploi pour
cet ordre du nom Gymnophiona Müller, 1831. Ce nom fut en effet proposé par
MULLER (1831: 198) pour un ordre. Toutefois, tous les auteurs jusqu'à pré-
sent ont ignoré le fait que, plus de quinze ans auparavant, RAFINESQUE-
SCHMALTZ (1814: 104) avait déjà créé un ordre des Gymnophia pour ces ani-
maux. Le nom Gymnophiona ayant la même racine que le nom Gymnophia, et ayant
bénéficié d'un consensus parmi les auteurs ultérieurs, il est légitime de le
conserver, et de le considérer comme une simple émendation du nom Gymnophia.
L'ordre en question doit donc maintenant être désigné du nom de Gymnophiona
Rafinesque-Schmaltz, 1814. Comme nous le discuterons en détail ailleurs (DU-
BOIS, 1984 c), le genre-type par monotypie de cet ordre est Cecilia Rafines-
que-Schmaltz, 1814, un nom de remplacement pour Caecilia Linné, 1758. Notons
enfin que le nom Gymnophiona Rafinesque-Schmaltz, 1814 est antérieur au nom
Source : MNHN, Paris
113
Apoda Merrem, 1820, ce qui est une raison supplémentaire pour rejeter ce
dernier nom.
En ce qui concerne les Urodèles, nous avons discuté ailleurs (DU-
BOIS, 1984 a) le problème du nom valable de cet ordre. Nous proposons ici de
généraliser aux sous-ordres des Urodèles le type de nomenclature suggéré par
SOKOL (1977) pour les Anoures, et dont nous avons souligné les avantages
(DUBOIS, 1984 a). La plupart des auteurs actuels (par exemple DOWLING &
DUELLMAN, 1978) reconnaissent l'existence au sein des Urodèles de quatre
sous-ordres (Cryptobranchoidea, Ambystomatoidea, Salamandroidea, Sirenoidea),
auxquels LAURENT (1984 c, ên RAFFAELLI, 1983) propose d'en ajouter un cin-
quième, les Proteoidea, ce qui équivaut quasiment à revenir à la classifica-
tion de NOBLE (1931). Toutefois, la désinence -oidea, ajoutée à un nom du
groupe-genre, est précisément celle recommandée dans son Art. 29 par le Code
(ANONYME, 1964) pour les noms de superfamilles, et est donc susceptible
d'être cause de confusions, surtout si dans l'avenir certains des sous-or-
dres d'Urodèles venaient à être subdivisés en superfamilles, comme le sont
les sous-ordres d'Anoures. Nous proposons donc de remplacer cette désinence
par la désinence -oïdei, suggérée par SOKOL (1977) pour les noms des sous-
ordres d'Anoures, et qui a déjà été employée pour désigner certains sous-
ordres d'Urodèles par certains auteurs (par exemple TATARINOV, 1964). Nous
proposons donc de donner aux cinq sous-ordres reconnus au sein des Urodèles
par LAURENT (1984 c, ên RAFFAELLI, 1983) les noms suivants: Cryptobranchoi-
dei, Ambystomatoidei, Salamandroidei, Proteoidei, Sirenoidei.
Examinons maintenant les cas de quelques taxons du groupe-famille
dont les noms doivent être remplacés par des synonymes plus anciens - cas
sur lesquels nous reviendrons plus en détail ultérieurement (DUBOIS, 1984 c).
Chez les Gymnophiones, le nom Epicriidae Fitzinger, 1843 doit rem-
placer le nom récent Ichthyophiidae Taylor, 1968 comme nom valide de la fa-
mille comportant le genre Ichthyophis Fitzinger, 1826 (nom dont Epicaium Wa-
gler, 1828 est synonyme). De même, les noms Siphonopidae Bonaparte, 1850 et
Siphonopinae Bonaparte, 1850 sont en fait les noms valides de la famille et
de la sous-famille récemment reconnues par LAURENT (1984 a) sous les noms de
Dermophiidae Taylor, 1969 et Dermophiinae Taylor, 1969, et comportant les
genres Siphonops Wagler, 1828 et Dexmophis Peters, 1879.
Chez les Urodèles, au sein de la sous-famille Plethodontinae Gray,
1850 de la famille Plethodontidae Gray, 1850, le nom Mycetoglossini Bonapar-
Source : MNHN, Paris
114
te, 1850 doit remplacer le nom Hemidactyliini Hallowell, 1856 comme nom va-
Tide de la tribu comportant les genres Hemidactybium Tschudi, 1838 et Pseu-
dotriton Tschudi, 1838 (dont Mycetog£ossus Bonaparte, 1839 est un nomen
substitutum) .
Dans quelques autres cas, malgré l'existence d'un synonyme plus
ancien, le nom actuellement employé peut être conservé en vertu de l'Art. 40
du Code (ANONYME, 1964), mais il doit alors changer de date. C'est ainsi
que, chez les Gymnophiones, Cecilinia Rafinesque-Schmaltz, 1814 (fondé sur
Cecilia Rafinesque-Schmaltz, 1814) a la priorité sur Caeciliadae Gray, 1825:
en vertu de l'Art. 40, la famille doit donc être appelée maintenant Caeci-
liidae Gray, 1825 (1814). Chez les Urodèles, le nom Ellipsoglossidae Hallo-
well, 1856 à la priorité sur le nom Hynobiidae Cope, 1859; le nom ELLipso-
glossa Duméril, Bibron & Duméril, 1854 étant un synonyme du nom Hynobius
Tschudi, 1838, la famille conserve le nom d'Hynobiidae Cope, 1859 (1856).
De même, le nom Sixedon Wagler, 1830 étant un synonyme du nom Ambystoma
Tschudi, 1838, l'existence du nom Siredontidae Bonaparte, 1850 entraîne un
changement de date pour la famille et la sous-famille comportant le genre
Ambystoma: celles-ci doivent donc être désignées dorénavant sous les noms
respectifs d'Ambystomatidae Hallowe11, 1856 (1850) et d'Ambystomatinae Hal-
lowe11, 1856 (1850). Enfin, le nom de sous-famille Triturinae Kuhn, 1965
possède trois synonymes plus anciens: Tritonia Rafinesque, 1815, nom invali-
de en vertu de l'Art. 39 car fondé sur un nom de genre (Taiton Laurenti,
1768) qui est un homonyme plus récent d'un autre nom de genre (Triton Linné,
1758); Molgidae Gray, 1850, basé sur le nom Molge Merrem, 1820, qui est, au
même titre que Trituwus Rafinesque, 1815, un nom de remplacement pour Triton
Laurenti, 1768; et enfin Geotritonidae Bonaparte, 1850, fondé sur le nom gé-
nérique Geotriton Bonaparte, 1832, qui est, comme nous l'avons récemment
montré. (DUBOIS, 1984 b), un synonyme subjectif de Trituwus Rafinesque, 1815.
Cette sous-famille doit donc maintenant porter le nom de Triturinae Kuhn,
1965 (1850).
Enfin, trois taxons du groupe-famille d'Urodèles doivent changer
d'auteurs et de dates: il faut écrire Cryptobranchidae Fitzinger, 1826, et
non pas, comme on le fait traditionnellement, Cryptobranchidae Cope, 1889;
de même, il faut écrire Proteidae Gray, 1825, au lieu de Proteidae Tschudi,
1838; enfin, il faut écrire Pleurodelinae Tschudi, 1838, et non pas Pleuro-
delinae Cope, 1886.
Source : MNHN, Paris
115
Pour finir cette note, signalons un dernier problème nomenclatu-
ral, concernant cette fois l'ordre des Anoures. LAURENT (1980, 1984 b-c) es-
time que les groupes que nous répartissons pour notre part (DUBOIS, 1981,
1983, 1984 a) au sein de deux familles distinctes des Arthroleptidae Mivart,
1869 et des Hyperoliidae Laurent, 1943, doivent être réunis en une seule fa-
mille, et donne à celle-ci le nom d'Hyperoliidae: bien entendu, si cette
classification est retenue, la famille doit porter le nom d'Arthroleptidae
Mivart, 1869, avec les sous-familles des Arthroleptinae Mivart, 1869, des
Astylosterninae Noble, 1927 et des Hyperoliinae Laurent, 1943.
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Journal International de Batrachologie
International Journal of Batrachology
édité par la Société Batrachologique de France
: Rédacteurs: Alain DUBOIS et Jean-Jacques MORERE, Laboratoire des Reptiles
et Amphibiens, Muséum national diMistotre naturelle, 25 rue Cuvier,
s 75005 Paris, France. :
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sidant ‘en France: 70 F.
Alytes, 1984, 3 (3): 97-116.
SOMMAIRE
Raymond F. LAURENT La phylogenèse des Ranoidea et Le cladisme ......... 97
Alain DUBOIS Miscellanea nomenc£atonica batrachologica (IV) ..... 103
Alain DUBOIS Méscellanea nomenc£atonica batrachologica (UV) ...... 111
ANNONCE
Henpeto£ogy of Anabia ..........ssssssoserersenoces 102
Imprimé aux Ateliers de la Couronnerie, 45160 Olivet.
Dépôt légal: 3ème trimestre 1984.
Source : MNHN, Paris